La vie c'est plus beau que la fiction ? ou l'inverse…

Publié le par Nicolas Jaillet

Cet après-midi j'ai enfin vu le film (éblouissant, comme toujours) de Jane Campion : "Bright Star". Avec une amie. À l'issue de quoi, j'eus avec l'amie que je vous cause une brève discussion sur le thème de l'amour et de la fiction : nous est-il donné de vivre de belles histoires d'amour ? Qu'est-ce qui fait que, dans la vie, l'amour est moins joli à regarder qu'au cinéma ? Parce qu'au cinéma, il y a des arbres en fleur, et de la neige ? Il y a des arbres en fleur dans la vie. Et de la neige. Parce qu'au cinéma, les amants s'effleurent à peine, et qu'ils meurent de tuberculose avant d'avoir eu le temps de s'ennuyer ensemble ? Il y a de ça.

 

Mais c'est un aspect discutable de la belle histoire d'amour, à mon goût. S'il faut tous qu'on se suicide alcoolique et neurasthénique à trente quatre ans pour vivre une belle histoire d'amour, ben, moi je préfère en vivre des moches. J'en ai bientôt trente huit, mon destin ne sera jamais aussi tragique que celui de Keats, tant pis pour moi. Est-ce que, pour autant, je n'ai pas vécu de belles histoires d'amour ? Je demande à voir. Que des belles ? Non, certes. Mais je pense qu'on a l'occasion, dans une espérance de vie de soixante dix ans, de connaître un bon paquet de belles histoires qui concernent l'union de deux êtres discontinus. Y a pas toujours des arbres en fleur, alors quoi ? Eh bien… Ce qui fait une belle histoire, à mon avis, c'est un certain rythme. L'appétit, le besoin, la tendresse, l'affection… La façon dont ces choses essentielles montent en puissance, sans griller d'étapes, mais sans forcément recourir au jansénisme et au qu'en-dira-t-on pour freiner artificiellement le processus, voilà qui fait de nos vies de belles histoires, si on le veut. 
Il peut y avoir du sperme, ou pas. Des larmes, ou pas. La narration a une tendresse particulière pour le malheur, mais ce n'est pas parce que nos vies ne font pas des récits qu'elles ne méritent pas d'être belles.

Publié dans Opinions de moi

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article